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, Ouvre une nouvelle fenêtre(par Cyril Bagnaud, Angers Loire Métropole)
Jusqu'à la fin du 19ème siècle ni la ville d'Angers ni aucune commune de l'agglomération ne possède de réseau d'égout. Il y a bien quelques collecteurs, mais en 1897 ils ne couvrent qu'un quart des rues d'Angers et n'ont été construits que pour évacuer les eaux de pluie et aucunement les eaux sales. La pluie et les eaux usées se mélangent donc et courent le long des rues, de larges flaques malodorantes se forment et incommodent les passants et les riverains. L'écoulement des eaux est ensuite dirigé vers la Maine et on ne se soucie pas encore de leur traitement. La pollution ? On en a conscience mais on compte sur le débit de la rivière pour diluer les effluents.
Au début du 20ème siècle la population angevine est en pleine croissance, poussée par un développement des industries gourmandes en main d'œuvre. La ville s'étend et se densifie mais les réseaux ne suivent pas et au lendemain de la première guerre mondiale le retard de l'agglomération angevine dans le domaine de l'assainissement est énorme. En 1934, quelques élus dynamiques préconisent dans le Plan d'aménagement de la ville d'Angers la création d'un réseau d'assainissement séparatif avec la construction d'une usine de traitement des eaux usées qui " sera placée le plus près possible de la Maine, à l'aval, sur la rive gauche, à un niveau suffisamment élevé pour éviter les submersions en temps de crues ". Celle-ci va mettre 40 ans à sortir de terre.
A la veille de la seconde guerre mondiale, les familles non équipées de l'eau courante sont largement majoritaires. Elles doivent faire leurs lessives dans la Maine ou dans des lavoirs publics parfois construits très récemment comme celui de la rue Prosper-Bigeard près de La Chalouère.
Ceux-ci sont des hauts lieux de convivialité féminine et de commérage, mais ils ne sont ni très pratiques, ni très écologiques. Autre solution, les pittoresques bateaux-lavoirs, privés et payants.
En 1936 on en compte encore 13 amarrés le long des quais de la Maine et si très peu vont survivre à la guerre, le dernier sera tout de même fréquenté jusqu'au milieu des années 1950.
Ainsi en 1939 le réseau de tout-à-l'égout d'Angers est pour le moins embryonnaire : 4% seulement des immeubles sont raccordés! De nombreux bâtiments publics n'ont pas de branchement, ce qui sidère l'armée allemande lorsqu'elle occupe la ville en 1940! Les eaux usées (vaisselle, toilettes, lessives…) sont rejetées dans les caniveaux et courent à ciel ouvert le long des trottoirs jusqu'aux bouches d'évacuation des eaux pluviales. Des ruisseaux sont utilisés pour l'évacuation de ces eaux, comme le Frotte-Pénil ou le Mongazon, dégageant des odeurs nauséabondes et posant des problèmes de salubrité qui seront évoqués devant le Conseil Municipal plus de vingt ans durant. La Maine et l'étang Saint-Nicolas servent alors de déversoirs et sont pollués par les eaux usées de toute la ville d'Angers.
La guerre terminée Angers panse ses plaies et entame la reconstruction de ses quartiers sinistrés. L'économie redémarre et les angevins aspirent à plus d'hygiène et plus de confort.
Mais les progrès sont lents et en 1954, 29% seulement des logements angevins possèdent des WC privés et intérieurs. Ceux-ci sont reliés à des "fosses d'aisance", rarement septiques, qui nécessitent une vidange périodique. Mais la règle générale reste les cabinets de fonds de cour ou de jardin, le plus souvent primitifs et dotés d'une fosse plus ou moins étanche qui favorise le pullulement des insectes et la contamination des nappes phréatiques alimentant les puits. La municipalité d'Angers décide de réagir et d'accélérer la construction de réseaux et d'équipements modernes.
Les quartiers reconstruits et les nouveaux ensembles des années 1950 sont les premiers desservis. Ainsi en 1954 est construite la station d'épuration de la cité Verneau qui vient de sortir de terre. Située rue du Général Lizé, la station de petite capacité est composée d'un décanteur, d'un lit bactérien et de deux lits de séchage des boues. On s'occupe ensuite de la mise en place de grands collecteurs : un sur la rive gauche et un sur la rive droite de la Maine. En 1964 on construit également trois stations de relèvement des eaux usées pour faciliter leur évacuation à la rivière. La première se situe Cité du pin, boulevard Estienne d'Orves ; la deuxième Place Raymond Toublanc et enfin la dernière est placée sur la rive droite de la Maine, près du pont de la Basse Chaîne. En 1965 une nouvelle station de relèvement est construite à La Trousselière, rue Claude Bernard puis l'année suivante une autre à Belle-Beille, près de la nouvelle cité universitaire boulevard Lavoisier. Le réseau s'étend peu à peu mais il ne représente alors que 60 kilomètres d'égouts d'eaux usées. Un tiers seulement des habitants est desservi. Angers veut rattraper son retard à marche forcée et en trois ans 25 kilomètres de canalisation sont posés. Dans le centre-ville on éventre les rues les unes après les autres pour poser de nouvelles canalisations, dans la périphérie les ensembles de Belle-Beille, Verneau, Daguenet, La Chesnaie, Salpinte et Ecce Homo sont raccordés au réseau vannes qui se met en place.
Si les nouvelles constructions se raccordent quasi-naturellement au tout-à-l'égout, il n'en est pas de même des immeubles anciens. Le problème n'est pas spécifique à l'agglomération angevine, toutes les villes de France dressent le même constat. Les législateurs décident au début des années 1960 d'accélérer les choses : une loi est bientôt promulguée pour obliger les propriétaires d'immeuble à se raccorder lorsque le tout-à-l'égout est installé dans la rue. Ils ont deux ans pour se mettre en conformité s'ils ne veulent pas payer de pénalités.